Sans une égratignure

Égratigner, d’abord esgratiner au 12siècle, dérive de gratiner, diminutif de gratter.

Le verbe signifie « écorcher en déchirant superficiellement la peau » : égratigner le visage. Par analogie, « abîmer, détériorer légèrement quelque chose en provoquant des rayures, des traces » : égratigner une voiture, égratigner un disque. Travailler une étoffe avec la pointe d’un fer pour lui donner une forme : égratigner la soie. Labourer sommairement : égratigner la terre. Au figuré, il désigne une personne qui, par méchanceté ou malice, en blesse une autre avec des propos piquants ou ironiques, sens illustré dans la locution proverbiale ancienne s’il ne peut mordre, il égratigneÉgratignure revêt les mêmes sens que le verbe. Les autres dérivés endossent des formes plus rares : égratignement, égratigneur, euse, égratignant, ante et égratignoir « fer à découper ».

Grafigner ou graffigner, d’abord grafiner, vient sans doute de krafla « gratter » en ancien scandinave.

Vers 1200, il est attesté en vieux français avec le sens spécifique de « gratter (la terre) avec les ongles », puis, sous l’influence des représentants de la famille d’égratigner, « griffer, blesser légèrement » : « Si un [garçon] essayait de l’embrasser dans un coin, elle lui graffignait la figure comme une furie » (Marcel Pagnol, Fanny, 1932). Au 17e siècle, le mot passe naturellement dans les colonies françaises d’Amérique mais aussi dans les parlers créoles de la Martinique, de la Guadeloupe et d’Haïti : grafiyen. Vieilli en France, il se maintient au Québec, surtout chez les locuteurs plus âgés. Avec les mêmes valeurs qu’égratigner « érafler, écorcher, rayer »: grafigner un pupitre. Malmener, provoquer par des attaques, des critiques : grafigner ses adversaires politiques.

Très familier et senti comme un québécisme, il développe d’autres acceptions jusqu’au début du 20siècle. En emploi pronominal, par analogie au mouvement de la main, « écrire, griffonner » : grafigner un chèque. Jouer d’un instrument de musique de façon rudimentaire : grafigner la guitare. Manifester de l’impatience, de la frustration : grafigner les murs. Dans la langue des sports, jouer avec beaucoup d’énergie, de combativité : grafigner la patinoire. En parlant d’états affectifs, causer une vive douleur, porter un coup pénible : grafigner la confiance (de quelqu’un). Dans le domaine de la musique, comme verbe intransitif, provoquer de vives sensations par les sonorités rudes et parfois métalliques des instruments : des tounes (chansons) qui grafignent. Travailler sans relâche, déployer de grands efforts : grafigner du matin au soir. Les variantes égrafigner ou égraffigner, plus proches encore d’égratigner, sont pratiquement sorties d’usage. Les dérivés sont grafignure ou grafigne, grafigné, grafigneux, grafigneuse, grafignage, grafignant.

 

Devoir

Rare, grafigneux, grafigneuse désigne une personne qui provoque, malmène, critique. Régionalement au Québec, surtout dans Charlevoix, au Saguenay-Lac Saint-Jean et dans le Bas-Saint-Laurent, il revêt, au féminin, un autre sens. Lequel?

  • Péteuse de broue (vantarde).
  • Accoucheuse.
  • Cancanière.

Réponse

Péjorativement, une accoucheuse malhabile.